Miroir de nos peines (Pierre Lemaître)

La débâcle de 1940 en mode tragi-burlesque

Troisième volet de la saga du XXème siècle par Pierre Lemaître et je ne parle pas de trilogie tellement je souhaite que cela n’en soit pas une !!

Après les gueules cassées de la première guerre mondiale, la crise financière de 1929 sur fond de vengeance, Pierre Lemaître nous embarque sur les routes de l’exode au printemps 1940 pour une fresque romanesque, aussi passionnante que flamboyante, très littérature du XIXème !

Miroir de nos peines est construits sur une alternance de narrateurs : Louise est une institutrice étrange, orpheline de père, elle a grandit auprès d’une mère neurasthénique et on sent bien qu’elle s’est construite sur un secret qui va exploser dès les premiers chapitres. Raoul et Gabriel sont deux soldats bien en peine en ce début de conflit aux tactiques approximatives. Fernand est garde-mobile, il y a Alice, Jules … et il y a aussi Désiré, le fabuleux affabulateur, l’homme caméléon, Désiré qui concentre à lui tout seul tout le côté fantasque du roman. C’est la débâcle et cette floppée de personnages va se retrouver sur les routes de France au milieu de millions de français …

Un peu plus de 500 pages qui se dévorent tant c’est jubilatoire. « Miroir de nos peines », c’est moins caustique et truculent que « Couleurs de l’incendie », moins noir que « Au revoir là-haut » mais tout aussi poignant grâce au talent de conteur et à la verve de l’auteur. Je ne parlerai pas du style ciselé et fluide auquel il nous a habitués, classique et classieux, jamais ennuyeux, du grand art !! Les personnages tous plus vrais que nature sont attachants et suscitent tour à tour empathie, compassion ou détestation. L’auteur jongle entre comédie et tragédie avec la maîtrise qu’on lui connaît et c’est un bonheur de lecture … M. Lemaître, SVP, poursuivez votre étude du siècle !

Miroir de nos peines
Pierre Lemaître
Editions Albin Michel
544 pages

Extrait : « La voiture cahotait lentement dans le flot des fuyards qui était à l’image de ce pays déchiré, abandonné. C’était partout des vigages et des visages. un immense cortège funèbre, pensa Louise, devenu l’accablant miroir de nos peines et de nos défaites »

Sur le même thème et si vous ne l’avez pas lu courrez chercher chez votre libraire le petit bijou qu’est « Les faux-Fuyants » écrit par Françoise Sagan.

Les derniers articles ...