Il n’y a pas une once de misérabilisme dans ce livre, juste un implacable constat qui fait froid dans le dos et une question latente, comment s’imaginer un avenir dans un coin ou les usines sont désaffectées et où les commerces ferment petit à petit ?
La façon d’écrire de Nicolas Mathieu, les dialogues, les expressions, tout sonne vrai dans ce livre. Il y a toujours cette violence sous-jacente, et c’est « sous tension » que j’ai dévoré ce livre, n’étant que spectatrice de ces destins malheureux, de ces projets noyés dans la poisse, l’alcool ou la drogue, de ces aspirations vers un lendemain meilleur pratiquement toujours avortées.
Ce roman est explosif de vérités, de celles qui font mal … le fond est sombre mais la forme est sensible et remplie d’une énergie positive.
Je ne sais pas si c’est à ce genre de livre que j’aurais donné le prix Goncourt mais ce qui est sûr c’est que ce portait hyper réaliste d’une France loin du parisianisme et victime de la mondialisation est le récit cruel d’une tragédie qui se vit sous nos yeux … à lire absolument !
Extrait :
« Un siècle durant, les hauts-fourneaux d’Heillange avaient drainé tout ce que la région comptait d’existences, happant d’un même mouvement les êtres, les heures, les matières premières … Anthony la connaissait bien cette histoire … Elle avait sifflé, gémi et brûlé, leur usine, pendant six générations, même la nuit. Et pour finir, il ne restait que ça, des silhouettes rousses, un mur d’enceinte, une grille fermée par un petit cadenas. »