de l’art d’être désagréable

La semaine dernière, la mère joie publiait un article dans lequel elle regrettait qu’ « on ne songe jamais suffisamment à faire chier ». Son billet m’a beaucoup amusé (les autres aussi d’ailleurs) mais surtout immédiatement fait penser au maître d’hôtel (un trop grand mot à porter pour ce jeune homme) qui officiait dans le restaurant de l’hôtel où nous avons séjourné pendant la formation.

Dès le premier soir, alors que nous sommes arrivés au restaurant affamés à 22 heures, il nous a accueilli d’un glacial bonsoir et nous a invités à patienter au bar le temps que la table soit dressée. Pas de risque de dérapage à l’apéritif car 20 minutes plus tard nous n’avions toujours pas vu l’ombre d’un verre, ni celle du maître d’hôtel. Nous nous sommes donc rappelés à son bon souvenir et notre table fut enfin dressée (soit des sets de table en plastiques et un simple jeu de couvert) … le jeune homme nous avait simplement oubliés.

Une fois installés, nous avons bien senti que cette table allait décaler son horaire de fin de journée mais cela ne l’a pas pressé pour autant et le temps de passer commande, à 23 heures nous étions enfin servis. 30 minutes pour constater à quel point sa compétence en termes de vin était proche du néant, n’ayant d’égale que son antipathie, il s’appelait Amboise.

Le lendemain, on prend les mêmes et on recommence. Comme nous étions 11, dont 7 forts de l’expérience de la veille, la table avait été dressée à l’avance à notre demande. A peine assez de cartes pour tous et des explications lapidaires sur les plats, l’incompétence culinaire d’Amboise égale celle en vins …

Allez, ma fille, ne soit pas si vache, il a choisi la salle, ni la sommellerie ni la cuisine … tout s’explique. Il n’empêche que, déformation professionnelle, je ne peux m’empêcher de traquer la moindre de ses manies, un sourire narquois adressé aux clients histoire d’avoir l’air aimable (traduire un perpétuel air de se moquer du monde), c’est sûr, Amboise n’est pas fait pour ce métier.

La commande passée, les premiers plats arrivent, pas les bons et il manque un plat. Erreur de débutant, à grosse table, vérification obligatoire du nombre de plats. Peu importe, les derniers mangeront alors que les premiers n’auront même plus d’assiette. Personnellement, ma soupe est bio … mais froide. Nous demandons un supplément de chaleur et ma collègue de la crème fraîche … impossible, nous répond-il, la soupe est bio !!! Ah, c’est un marrant notre Amboise.

Arrivent les plats, avec les mauvaises garnitures mais nous faisons contre mauvaise fortune bon cœur, et puis on recommence les derniers mangeront alors que les premiers n’auront plus d’assiettes … on en rit.

Au moment de la commande du dessert, nôtre maître d’hôtel s’essaye au par cœur, oublie, revient et nous amène quand même nos desserts. J’ai commandé un yaourt, j’ai un faisselle, et il me soutient mordicus que c’est pareil. Nous demandons de l’eau, c’est à croire qu’il la tire du puits, nous l’attendons depuis l’entrée. En désespoir de cause, je me lève pour attraper une bouteille laissée par une table à côté. Notre maître d’hôtel se rappelle alors qu’il a une salle à gérer et m’assène « Je vous l’aurais amenée Madame », puis repasse et dit « et je ne vous l’aurais pas fait payer » … aussi peu de savoir vivre me laisse sans voix. Une de mes collègues répond pour moi qu’elle est enceinte et a soif, et lui, du tac au tac, « c’est une fille ou un garçon ?  » … un festival notre Amboise.

A la fin de repas, j’ai particulièrement mal mangé mais en plus je suis bien forcée de me dire queLa mère joie a raison, « on ne songe jamais suffisamment à faire chier ». J’aurais du lui dire que le yaourt n’est pas un faisselle, que si on fait patienter les clients parce que la cuisine ne suit pas on s’excuse, qu’avec un sourire ça passe mieux et  qu’on le leur tend pas un rictus à la place … oui, j’aurais du …

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