Vanda (Marion Brunet)

Vanda, une tragédie contemporaine

Vanda se rêvait artiste et après un bref passage aux beaux-arts, elle est aujourd’hui agent d’entretien dans un hôpital psychiatrique.
Elle vit seule avec son fils Noé dans un cabanon précaire, sans eau courante ni électricité, au bord d’une plage à Marseille (la ville n’est jamais cité mais je n’ai pu imaginer cette histoire ailleurs que dans la cité phocéenne). Ces deux là avancent dans la vie soudés, liés, ligués même, contre le reste du monde. Vanda aime Noé d’un amour exclusif, dévorant, animal (elle le lèche, le respire, il dessine sur ses tatouages, s’accroche à ses cheveux) et il n’y a de place dans la vie de Vanda que pour les amours d’un soir et les amitiés superficielles.

Un équilibre si fragile

Sept ans après avoir disparu sans même savoir qu’il était le père de Noé, Simon refait surface et vient troubler ce fragile équilibre. Etrange situation pour cet homme qui retrouve Vanda avec qui il avait eu une relation sept ans plus tôt.  Alors qu’il n’est que de passage à Marseille pour enterrer sa mère, il se découvre père au même moment. Pour Vanda en révolte permanente, tout est un combat et bien qu’elle soit vraiment en galère, refuser la main tendue de Simon ne sera qu’une bataille supplémentaire.

Un livre sur les violences sociales et la précarité

Vanda est une écorchée vive aux manières rugueuses (et au langage de charretier mais l’écriture crue de Marion Brunet colle bien au personnage) : elle est sauvage, impulsive, désabusée ce qui l’a rend autant bouleversante qu’agaçante. Cet agacement, je l’ai parfois ressenti à la lecture, trouvant le passage sur les manifestations un peu trop caricatural dans le sens « Gilets jaunes » … la brutalité économique de la France des « rond-points » me dépasse parfois.
A contrario, le chapitre sur le travail saisonnier en Corse est particulièrement réussi.

La rage de vivre

J’ai découvert Marion Brunet avec l’été circulaire, roman noir, roman social et je retrouve cette écriture tenue, essentielle. Pas de fioritures ni de grandes démonstrations avec Marion Brunet qui brosse ici le portrait d’une femme qui sort les griffes, sentant le danger dès qu’on approche son fils, sa raison de vivre, sa béquille, d’un homme à qui la paternité donne un sens à la vie et de Noé, cet enfant tiraillé pour qui on pressent le pire tant sa mère est dysfonctionnelle.

C’est également le constat sans la moindre concession de la France en galère (chômeurs, intermittents, salariés sous contrats précaires …). Un roman à la tension montante jusqu’à la dernière phrase. On a beau sentir l’odeur du drame, la fin est saissante. Un roman politique qui frappe par son réalisme social.

Vanda
Marion Brunet
Editions Albin Michel 
240 pages

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