La garçonnière (Hélène Grémillon) – Rentrée littéraire 2013 0,72%

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J’avais adoré le premier roman d’Hélène Grémillon (Le confident) et dans le cadre des matchs de la rentrée littéraire c’est tout naturellement vers son second roman que je me suis tournée.

« La garçonnière » c’est l’histoire de Lisandra et de Vittorio Puig. Lisandra est une femme énigmatique, belle et fragile qui a rencontré Vittorio psychanalyste ; elle ne lui a pas livré son secret mais ils ne se sont plus quittés depuis cette entrevue en 1980. Sept ans plus tard, Lisandra est retrouvée gisante sur le trottoir, au pied de leur immeuble.

Vittorio est suspecté et incarcéré ; Eva Maria, une de ses patientes persuadée de son innocence est prête à tout pour prouver qu’il n’est pas coupable.

Cette histoire se déroule pendant les années 80, dans une Argentine essorée par la junte militaire, sur fond de Tango.

La construction conjugue différents systèmes de narration : la retranscription des cassettes enregistrées par le psychanalyste lors des entretiens avec ses patients, les rencontres avec les proches de Lisandra au fil de l’enquête ou les parloirs entre Eva Maria et Vittorio.

La première partie permet de définir les personnages mais le roman change de direction en prenant appui sur les cicatrices laissées après la chute de la dictature en Argentine, les exactions des juntes militaires étant encore omniprésentes dans toutes les mémoires. Hélène Grémillon nous plonge alors dans l’intimité de personnages ayant perdu des proches enlevés par la Junte, ayant été torturés ou ayant été tortionnaires.

Le cheminement de la pensée d’Eva Maria au fil de son enquête est un peu comme un jeu de piste ouvrant le champ de tous les possibles et tous les patients de Vittorio deviennent potentiellement coupables.

L’auteure nous offre tour à tour du suspense psychologique et du drame intimiste mais ces changements de rythme ou ces pistes un peu trop nombreuses  m’ont finalement pas mal déroutée et la grande histoire s’efface trop vite au profit de la petite.

Le final est totalement inattendu et le roman se lit comme un thriller psychique, mais quel dommage que le dénouement (terrible) soit amené trop vite, me laissant un goût amer d’inachevé.

Alors oui, je suis un peu déçue par ce roman au style à la fois direct et élégant, mais j’ai noté quelques passages sur la jalousie ou le désamour entre autres particulièrement poignants.

Page 247 «  Je me demande laquelle a commencé à l’éloigner de moi. Laquelle il a regardé un jour après n’avoir eu d’yeux que pour moi. Son éloignement n’a pas été brutal. Le désamour est progressif. Avant de n’aimer plus, on aime moins. Et encore moins et plus du tout. Mais cela, on ne s’en rend pas compte. Le désamour. Une relation devenue tiède, quotidienne, pragmatique, usuelle, utilitaire et habituelle, même pas raisonnée  car on y pense plus »

Page 169  après une confession particulièrement poignante « On a beau dire, les mots réduisent tout, la parole a beau tenter d’être précise, elle ne pourra jamais rendre compte du dilatement du temps, son débit devrait varier comme un métronome pour respecter l’espace temps d’une action. La seule chose de bien avec la parole c’est qu’elle délivre la voix, pour le reste, elle n’est pas fiable. »

Un grand merci à Oliver et à Price Minister pour ce livre qui m’a été offert.

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